Chanteuse, autrice, compositrice et figure contestataire de son pays, la star de la musique brésilienne s’est éteinte dans sa ville natale de São Paulo à l’âge de 75 ans. Elle nous avait fait l’honneur de choisir la Sacem pour gérer ses droits au niveau mondial en dehors du Brésil.
Elle a chanté le Brésil, l’a représenté telle une star internationale avec plus de 60 millions d’albums vendus dans le monde, des tubes inoubliables, s’est battue pour ses semblables ainsi que pour la cause animale.
Rita Lee Jones voit le jour le 31 décembre 1947 à São Paulo, d’une mère brésilienne et d’un père américano-brésilien. Scolarisée dans un lycée français, elle parlera couramment français, portugais, anglais, espagnol et italien. Après avoir appris le piano classique, elle demande une batterie à sa famille. La musique l’intéresse plus que tout et à l’adolescence, elle forme ses premiers groupes, dont un trio vocal en 1963, qui connait un succès en accompagnant des chanteurs. L’année suivante, celui-ci fusionne avec un trio masculin pour former le groupe O’Seis.
Lorsque trois membres le quittent afin de poursuivre leurs études, ne restent que Rita Lee ainsi que les frères Arnaldo et Sérgio Dias Baptista, le premier jouant de la basse et des claviers, le second de la guitare électrique. Ainsi naît en 1966 le groupe rock Os Mutantes qui va révolutionner la musique brésilienne de la fin des années 60 par son approche pop psychédélique et son audace avant-gardiste en pleine révolution tropicaliste, aux côtés de Gilberto Gil, Caetano Veloso ou encore Gal Costa.
Féministe convaincue, Rita Lee se sent vite à l’étroit dans le groupe et éprouve le besoin de s’affranchir en solo. Elle se lance en 1972 et forme avec Lúcia Turnbull le groupe Tutti Frutti où peuvent s’exprimer tant ses excentricités que sa folle irrévérence. Elle déploie une voix sensuelle et joueuse, capable de s’adapter à tous les rythmes, des plus doux aux plus énergiques, comme sur son célèbre Agora Só Falta Você. Parmi les quatre albums du groupe, Fruto Proibido (1975) marquera l’histoire du rock brésilien.
Ses textes croisent des thématiques jusqu’alors tabous dans un Brésil encore corseté où il reste mal vu d’évoquer ouvertement les sujets de la drogue, de l’homosexualité, du sexe ou de la répression policière. Rita Lee n’en fait qu’à sa tête et se plaît à provoquer les plus conservateurs par ses tenues de scène où elle joue l’androgynie. C’est ce qui fait le sel de ses chansons, qu’elle écrit seule puis avec son mari Roberto de Carvalho avec lequel elle publie plusieurs albums dans les années 80. Elle multiplie les collaborations, comme avec le futur écrivain Paulo Coelho pour nombre de textes dont Arrombou a Festa qui s’écoulera à 200 000 exemplaires.
C’est en 1980 qu’elle signe la chanson qui lui vaut un hit et une notoriété internationaux : Lança Perfume, un tube dansant et presque disco qui fait l’apologie d’une drogue locale qui se respire en soirée, et vient s’ajouter à tous les hits gravés au Brésil : Mania de Você, Doce Vampiro, Desculpe o Auê… tous fruits de ses racines musicales fortement ancrées dans son pays, mêlées à sa vision universelle du rock.
Sa carrière déclinera par la suite et Rita Lee se consacrera à l’écriture de livres pour enfants ainsi qu’à la comédie. Elle vend toutefois plus de 350 000 exemplaires d’un disque live acoustique enregistré pour un show TV brésilien en 1991, Mick Jagger lui demandera de jouer en première partie de la tournée brésilienne des Rolling Stones et se fend d’un inattendu ultime album en 2012, Reza. Elle publie une touchante autobiographie en 2016 où se dessinent tant ses épreuves personnelles que la foi en la vie, éclairant sur l’intensité de sa personne et de son œuvre.
Rita Lee avait adhéré à la Sacem en 2003, en qualité d’autrice et de compositrice.
Publié le 15 mai 2023